Les data centers du futur : alimentés par des câbles supraconducteurs pour une croissance évolutive et durable
Électrification de demain
19 novembre 2025
12 min
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Répondre aux besoins d’un monde numérique en pleine expansion

Depuis 2010, le nombre d’utilisateurs d’internet dans le monde a plus que doublé – 5,5 milliards utilisateurs d’internet en 2024, tandis que le volume du trafic en ligne a été multiplié par vingt-cinq. Véritable colonne vertébrale de l’économie numérique, les data centers se sont développés à un rythme sans précédent. Pourtant, leur mode d’alimentation énergétique n’a pas évolué au même rythme que leurs usages.

Imaginez vouloir relier deux villes éloignées avec une simple locomotive, alors qu’il vous faudrait un train à grande vitesse. C’est exactement le défi auquel sont confrontés les data centers modernes : devenus de véritables usines à données. Ces infrastructures qui consommaient autrefois quelques dizaines ou centaines de mégawatts franchissent désormais le seuil du gigawatt, atteignant des niveaux comparables à ceux de l’industrie lourde. Cette montée en puissance met à rude épreuve les systèmes d’alimentation traditionnels à base de cuivre, obligeant les opérateurs à consacrer toujours plus d’espace, de refroidissement et de capitaux à leurs réseaux internes plutôt qu’à la puissance de calcul.

Jusqu’à présent, les gains d’efficacité ont permis de contenir la consommation énergétique totale des data centers entre 1 et 1,5 % de la demande mondiale. Mais si la tendance se poursuit, cette part pourrait grimper à 10 % d’ici 2030. Pour accompagner cette croissance de manière durable tout en maintenant un taux de disponibilité de 99 %, il est nécessaire de repenser en profondeur la distribution électrique interne.

Alimenter les data centers de nouvelle génération

L’alimentation des data centers à l’échelle du gigawatt repose généralement sur deux niveaux de tension :

  • À l’extérieur des bâtiments, des câbles relient les salles informatiques au réseau de transport ou de distribution. Ils alimentent les data centers à partir des postes électriques haute tension, principaux et secondaires, au moyen de câbles haute et/ou moyenne tension.
  • À l’intérieur, les racks et équipements informatiques des salles sont connectés à un niveau de tension faible, à l’aide de câbles de distribution.

Chaque niveau de tension présente ses propres défis face aux besoins énergétiques colossaux des data centers, en particulier ceux dédiés à l’intelligence artificielle.

Au niveau de la moyenne tension, la puissance totale d’un data center est répartie entre ses différentes salles de données, où sont hébergés les serveurs. Pour donner un ordre d’idée : un data center de nouvelle génération peut nécessiter entre 100 et 400 MW par salle de données, selon sa taille et ses choix d’architecture. Fournir une telle puissance impose l’installation d’un très grand nombre de câbles en parallèle. Comme ces câbles sont généralement enterrés, cela engendre plusieurs contraintes :

  • une emprise au sol importante,
  • des coûts de génie civil très élevés,
  • et des pertes électriques (pertes Joule), qui réduisent le rendement et réchauffent le sol.

Exemple :

L’alimentation d’une seule salle informatique de 300 MW nécessite 36 câbles de forte section (600 mm²) à 33 kV. Un data center de 1,8 GW comptant six salles de 300 MW aurait donc besoin de 216 câbles enterrés — une infrastructure massive, complexe et extrêmement coûteuse.

Au niveau basse tension, à proximité des salles de données, des transformateurs abaissent la tension moyenne pour alimenter directement les équipements informatiques. Acheminer entre 100 et 400 MW sous 480 ou 600 volts génère des courants très élevés, de l’ordre de 6 à 10 kA.

De tels courants nécessitent un très grand nombre de câbles basse tension, installés à l’intérieur de la salle des données dans des chemins de câbles. Cette solution entraîne plusieurs contraintes :

  • Une emprise au sol importante.
  • Une architecture d’installation complexe et onéreuse.
  • Des exigences strictes en matière de compatibilité électromagnétique, tant entre les câbles d’un même chemin de câbles qu’avec les équipements situés à proximité.
  • Une gestion thermique : le câblage conventionnel en cuivre génère une chaleur importante, ce qui entraîne une augmentation de la demande en systèmes de chauffage, ventilation et climatisation et contribue à des inefficacités opérationnelles.

À cela s’ajoutent les pertes Joule, qui peuvent à elles seules diminuer le rendement global d’un data center de 5 à 10 %. Aujourd’hui, certaines solutions envisagent déjà de refroidir les câbles basse tension pour limiter ces pertes et améliorer l’efficacité. Mais cela souligne surtout les limites des solutions de câblage conventionnelles.

Chiffres clés de l’infrastructure numérique

1+ GW

capacité énergétique des data centers hyperscale de nouvelle génération

10 à 12 %

de la demande en électricité pour alimenter les data centers, soit 3,1 TWh d’ici à 2030

99 %

exigence de disponibilité imposant une résilience exceptionnelle du réseau interne

Les limites : la supraconductivité au service des data centers de nouvelle génération

Les atouts de la distribution interne

  • Aucune perte d’énergie : rendement supérieur à 99,99 % et baisse des coûts d’exploitation.
  • Densité de courant exceptionnelle : un seul câble de 300 MW à 33 kV remplace 36 câbles en cuivre de 600 mm² ; un unique câble basse tension (480 V / 600 V) peut transporter jusqu’à 10 kA, avec un diamètre inférieur ou égal à 250 mm.
  • Infrastructure simplifiée : moins de câbles, moins de travaux de génie civil, installation plus rapide.
  • Absence d’interférences : compatibilité électromagnétique totale.
  • Efficacité thermique : aucune dissipation de chaleur, environnement stable.

Assurer des opérations résilientes et durables

La supraconductivité ne se limite pas au transport d’énergie : elle contribue aussi à la protection des réseaux électriques grâce aux limiteurs de courant de défaut supraconducteurs. Conçus pour absorber les courants de défaut élevés dans les réseaux moyenne et basse tension — notamment au sein des data centers —, les SFCL réduisent considérablement, voire suppriment, les surintensités. Ils garantissent ainsi la continuité de service, un enjeu critique pour ce type d’infrastructure. Leur utilisation allège également la contrainte sur les disjoncteurs et l’électronique de puissance, simplifiant toute l’architecture électrique, des transformateurs jusqu’aux équipements informatiques.

Le mode de fonctionnement est le suivant : en conditions normales, un limiteur de courant de défaut supraconducteurs présente une résistance nulle et n’a donc aucun impact sur le réseau. Mais lorsqu’un défaut fait dépasser le courant nominal, le matériau supraconducteur bascule instantanément dans un état résistif. Cette résistance temporaire n’apparaît que durant le défaut et permet de réduire fortement le courant de court-circuit.

À titre d’exemple, dans un réseau de data center où les courants de défaut moyenne tension peuvent atteindre de 20 kA à plus de 50 kA en pointe, la présence d’un limiteur de courant de défaut supraconducteurs peut diviser ces valeurs par deux, voire davantage. Ce dispositif limite ou élimine le défaut tout en réduisant les contraintes sur l’ensemble des composants électriques. Résultat : une durée de vie accrue des équipements, des coûts réduits de maintenance et, surtout, une continuité de service assurée de manière entièrement autonome.

Une résilience renforcée grâce à une protection avancée

Pour les opérateurs de data centers, les limiteurs de courant de défaut supraconducteurs offrent des capacités de protection bien supérieures aux systèmes conventionnels :

  • Protection renforcée des infrastructures critiques, notamment les transformateurs, appareillages de commutation et unités de distribution électrique.
  • Réduction du risque de pannes en cascade pouvant affecter plusieurs zones du site.
  • Amélioration de la qualité de l’alimentation grâce à une gestion automatique des courants de défaut.
  • Diminution des besoins de maintenance, liée à la réduction des contraintes mécaniques sur les équipements de protection.
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Accélérer l’avenir des infrastructures numériques

Face à la croissance exponentielle des besoins numériques, la technologie supraconductrice pourrait rendre les data centers — longtemps perçus comme énergivores — efficaces, résilients et intégrés aux réseaux intelligents.

La compacité et la modularité des systèmes supraconducteurs permettent d’implanter les data centers plus près des zones urbaines, réduisant ainsi la latence des réseaux et les pertes liées au transport d’électricité depuis des sites éloignés. Cette approche soutient un modèle d’infrastructure distribuée, indispensable à la fois à la performance des services numériques et à la stabilité des réseaux électriques. À mesure que l’économie numérique poursuit sa croissance, les gains d’efficacité offerts par la supraconductivité deviennent un levier clé de développement durable.

Des entreprises comme Nexans, pionnière des systèmes de câbles supraconducteurs et des limiteurs de courant de défaut supraconducteurs, impulsent cette révolution infrastructurelle à travers la recherche, la production et le déploiement de solutions innovantes — ouvrant la voie aux data centers de nouvelle génération et à un avenir numérique durable.

Gabriel Hajiri

Auteur

Gabriel Hajiri a rejoint Nexans en 2024 en tant qu’ingénieur systèmes supraconducteurs au sein de l’unité Nexans MCS. Il pilote la normalisation des câbles supraconducteurs moyenne et haute tension et contribue au développement de solutions innovantes en basse tension.

Titulaire d’un doctorat de l’Université de Lorraine à Nancy, France, il est spécialisé dans les systèmes supraconducteurs et cryogéniques, avec une expertise complémentaire en architecture électrique.

Une nouvelle ère de l’électrification :
La transmission comme levier stratégique
Électrification de demain
12 novembre 2025
3 min
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La transition énergétique n’est plus un objectif lointain — elle est déjà en cours. Dans les secteurs du transport, de l’industrie et des systèmes numériques, la demande en électricité augmente rapidement, et les infrastructures de transmission sont au cœur de cette transformation. La capacité à concevoir, connecter et développer rapidement les réseaux énergétiques déterminera la prochaine phase de l’électrification mondiale.

Pourtant, des obstacles importants subsistent. Entre complexité des autorisations, pression sur les chaînes d’approvisionnement, préparation des effectifs et coordination institutionnelle, relever ces défis est essentiel pour libérer le plein potentiel d’un réseau électrique modernisé.

Ce livre blanc rassemble les données et analyses stratégiques indispensables aux décideurs pour naviguer dans un environnement énergétique en pleine mutation. Il propose une vision claire sur la modernisation des réseaux, la réforme réglementaire et le rôle stratégique de la transmission dans l’intégration des énergies renouvelables.

Principaux enseignements pour la stratégie énergétique
  • La transmission comme actif stratégique : Plus de 2 600 GW de projets énergétiques sont actuellement en attente dans les files d’attente d’interconnexion aux États-Unis, montrant comment les contraintes du réseau influencent les risques pour les investisseurs et la planification énergétique des entreprises.
  • L’urgence de la réforme réglementaire : Simplifier les processus d’autorisation pourrait permettre de débloquer plus de 1 500 GW de capacité renouvelable à l’échelle mondiale d’ici 2030.
  • Préparation des chaînes d’approvisionnement en câbles : Les délais de livraison des câbles haute tension ont doublé depuis 2020, faisant de la localisation et de l’innovation des chaînes d’approvisionnement une priorité.
  • Modèles économiques émergents : Les nouvelles offres de Transmission-as-a-Service (TaaS) et les technologies améliorant le réseau redéfinissent la manière dont le capital et l’innovation circulent dans le système électrique.
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Livre blanc

A New Era of Electrification: Transmission as the Strategic Enabler

Télécharger le livre blanc (en anglais)

Pourquoi la transmission est la base de l’avenir

La transmission n’est plus simplement une nécessité technique — elle est un levier stratégique pour la compétitivité, la résilience et l’équité énergétique. Ce livre blanc fournit des recommandations pour les investisseurs, les décideurs et les entreprises, en montrant comment considérer la transmission comme un pilier de croissance durable plutôt qu’une contrainte.

Alors que le transport électrifié, les systèmes numériques basés sur l’IA et l’électrification industrielle redéfinissent la demande énergétique, une infrastructure de transmission modernisée devient essentielle pour atteindre les objectifs de décarbonation et construire un réseau électrique résilient et tourné vers l’avenir.

Téléchargez le livre blanc (disponible en anglais) pour découvrir comment la transmission alimente la prochaine étape de l’électrification et libère le plein potentiel de la transition énergétique en Amérique du Nord et dans le monde.

Nexans Innovation Summit 2025 stage

Cela fait suite au Nexans Innovation Summit, organisé à Toronto, qui a réuni des leaders mondiaux de l’énergie, des politiques publiques, de la finance et de la technologie pour aborder l’un des défis majeurs de notre époque : comment développer et moderniser les infrastructures de transmission afin de répondre à la demande croissante en électricité à l’ère de l’IA, des transports électrifiés et de la croissance numérique.

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Accélérer l’électrification grâce à l’innovation partagée
Électrification de demain
31 octobre 2025
8 min
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Entretien avec Grégoire Morineaux

Directeur Innovation, Stratégie & Achats de REXEL France

L’électrification est au cœur de la transition énergétique. Mais derrière ce mot devenu omniprésent, se joue une transformation industrielle et sociétale profonde : nouvelles technologies, nouveaux usages, nouveaux modèles de collaboration. À travers leur partenariat, Nexans et Rexel illustrent la manière dont l’innovation partagée et la proximité avec le terrain peuvent rendre cette transformation concrète, efficace et durable.

L’électrification durable : essentielle à la décarbonation

Face à l’urgence climatique, l’électrification s’impose comme l’un des leviers les plus puissants de la décarbonation. Selon l’Agence internationale de l’énergie, plus de 70 % de la réduction nécessaire des émissions d’ici 2050 proviendra de technologies électriques : chauffage, mobilité, production industrielle, data centers.

Mais pour y parvenir, il faut bien plus qu’une simple substitution énergétique : il faut repenser les réseaux, les usages, et les infrastructures dans leur ensemble. C’est précisément sur ce terrain que s’allient Rexel, spécialiste de la distribution de solutions énergétiques, et Nexans, acteur essentiel de l’électrification durable, et leader de la conception et de la fabrication de câbles et systèmes électriques.

Des partenaires au cœur de la chaîne de valeur

L’un distribue, l’autre conçoit et fabrique : ensemble, Rexel et Nexans relient les innovations industrielles aux besoins concrets du terrain.

Ce partenariat s’inscrit dans une logique d’écosystème : Rexel, grâce à son réseau de distribution et à sa connaissance des installateurs et des intégrateurs, capte les attentes du marché. Nexans, de son côté, développe des solutions techniques et digitales pour y répondre — qu’il s’agisse de câbles à faible empreinte carbone, de systèmes de gestion de câbles intelligents, ou de solutions de traçabilité.

Cette boucle vertueuse permet d’accélérer la diffusion de technologies nouvelles tout en garantissant leur adoption à grande échelle.

Nous partageons une conviction avec Nexans : l’électrification ne se fera pas par décret, mais par l’usage. Il faut que les solutions soient simples, efficaces et durables.

Grégoire Morineaux, Rexel France
Grégoire Morineaux

Directeur Innovation, Stratégie & Achats, Rexel France

Innover pour simplifier, connecter et décarboner

L’innovation est le fil conducteur de cette collaboration.

Chez Rexel, elle vise à simplifier la vie des installateurs et améliorer la performance des bâtiments. Chez Nexans, elle s’incarne dans la maîtrise de la technologie du câble — un maillon discret mais essentiel de la chaîne énergétique.

De cette convergence naissent des innovations concrètes :

  • Mobiway Pop Connect et Mobiway Mob, qui rendent la manipulation et l’installation des câbles plus ergonomiques et plus sûres ;
  • Le câble AR2V bas carbone, issu d’un processus industriel repensé pour réduire significativement les émissions de CO₂ ;
  • Des solutions de câblage intelligent permettant de mesurer la quantité de câble utilisée et d’optimiser la logistique sur chantier.

Ces innovations, présentées lors du Rexel Expo 2024, illustrent une approche commune : rendre tangible la transition énergétique, à travers des outils simples, concrets et mesurables.

Un partenariat fondé sur la proximité et la confiance

Au-delà des produits, ce partenariat repose sur une compréhension mutuelle du marché. Les équipes commerciales et techniques des deux entreprises travaillent en étroite collaboration pour adapter l’offre à la diversité des projets : bâtiments tertiaires, infrastructures industrielles, data centers ou mobilité électrique.

Cette proximité favorise également l’expérimentation. Plusieurs pilotes conjoints ont été menés ces dernières années pour tester des innovations en conditions réelles, qu’il s’agisse de nouvelles bobines, d’outils digitaux de suivi, ou de modèles logistiques bas-carbone.

Ce qui rend notre partenariat unique, c’est la capacité à co-construire. Nous partageons les retours du terrain, Nexans apporte son expertise technique, et ensemble nous accélérons l’adoption des solutions d’électrification.

Grégoire Morineaux, Rexel France
Grégoire Morineaux

Directeur Innovation, Stratégie & Achats, Rexel France

Vers un futur électrique, intelligent et responsable

L’électrification des usages n’est pas une fin en soi : c’est un changement systémique. Elle redéfinit la manière dont les bâtiments sont conçus, alimentés et pilotés. À l’heure où les systèmes deviennent interconnectés et intelligents, la donnée devient aussi essentielle que le câble.

C’est là que la collaboration entre Nexans et Rexel prend toute sa dimension : elle relie la performance technologique à la réalité opérationnelle, la transition écologique à la création de valeur locale.

L’avenir de l’électrification se jouera sur cette alliance entre l’innovation industrielle et la proximité terrain — une alliance que Nexans et Rexel incarnent déjà.

Rexel et Nexans en chiffres

15 ans

de partenariat actif en France et à l’international

Des milliers km

de câbles Nexans distribués chaque année par Rexel

Une offre conjointe

couvrant tous les segments de l’électrification : bâtiment, mobilité, industrie, data centers

Supraconductivité : alimenter les réseaux ferroviaires et numériques de demain
Électrification de demain
29 octobre 2025
13 min
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Le coût caché de notre réseau électrique

Imaginez perdre 5 % de votre carburant chaque fois que vous faites le plein. C’est pourtant la réalité de nos réseaux électriques actuels : les câbles traditionnels en cuivre et en aluminium gaspillent entre 3 et 5 % de l’énergie transportée, avec des pertes qui augmentent à mesure que la distance s’allonge.

Prenons deux secteurs particulièrement énergivores : les chemins de fer, qui déplacent chaque jour des millions de voyageurs, et les data centers d’intelligence artificielle, qui génèrent plus de 400 millions de téraoctets quotidiens pour alimenter chaque recherche Google ou chaque visionnage sur Netflix. Tous deux sont confrontés à la même urgence : accéder à une électricité plus propre et plus fiable pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici à 2050.

Avec une demande électrique en hausse de 4,3 % en 2024 — soit presque le double de la progression moyenne annuelle depuis 2010 — les optimisations marginales ne suffiront plus. Il faut une véritable transformation. Et la supraconductivité pourrait bien être la clé de ce changement.

1. Des défis partagés, des solutions communes

Gérer les charges extrêmes et la demande énergétique

Les réseaux ferroviaires connaissent des pics d’activité aux heures de pointe ; les data centers, eux, doivent absorber des charges de calcul intensives. Tous deux nécessitent une gestion fine de la charge, un pilotage en temps réel de l’énergie et un contrôle rigoureux de la qualité de l’alimentation.

Les câbles supraconducteurs à haute température (HTS) répondent à ces exigences grâce à leurs capacités de transmission exceptionnelles. Jusqu’à dix fois plus compacts que les câbles classiques, ils réduisent l’emprise au sol et les coûts d’installation, tout en supprimant totalement les pertes d’énergie.

Un seul câble supraconducteur peut acheminer plus de 2 GW en courant alternatif et plus de 3 GW en courant continu, dans une tranchée d’à peine cinquante centimètres de large. Cette conception compacte se révèle précieuse en milieu urbain, où le foncier est rare et coûteux. Un câble HTS de 15 kV en courant alternatif peut transmettre plus de 100 MVA à des niveaux de distribution — un avantage concurrentiel majeur.

Au cœur des salles de données, les câbles supraconducteurs à fort courant et basse tension permettent de gagner jusqu’à 24 fois plus d’espace que les solutions conventionnelles. Leur conception ultra-compacte garantit une densité de courant très élevée, des pertes de transmission quasi nulles et une empreinte globale considérablement réduite.

Garantir la fiabilité et la redondance

Dans les deux secteurs, l’exploitation en continu ne souffre aucun compromis : le moindre arrêt se traduit par des retards, des pertes de données, des pannes de système, voire des risques pour la sécurité. Les centres de données d’intelligence artificielle exigent une disponibilité dite « five nines » — soit 99,999 % de temps de fonctionnement —, tandis que les réseaux ferroviaires recherchent une redondance équivalente pour garantir des départs et arrivées parfaitement ponctuels. La redondance désigne la mise en parallèle de plusieurs alimentations. Une configuration qui permet d’alimenter en continu la chargée connectée même en cas de défaillance d’une source.

Les systèmes de câbles supraconducteurs intègrent une redondance complète, à la fois dans le câble HTS (haute température) et dans le dispositif de cryo-refroidissement. Le maintien d’une charge équilibrée assure la continuité du service et répond aux plus hauts standards de fiabilité opérationnelle.

Les limiteurs supraconducteurs de courant de défaut offrent une protection supplémentaire essentielle : ils réduisent automatiquement les surintensités sans interrompre le service. Cette technologie protège les transformateurs et les disjoncteurs, tout en renforçant la stabilité du réseau, la qualité de l’alimentation et la fiabilité globale du système.

Résoudre les défis de conversion électrique

Les câbles supraconducteurs en courant continu suppriment les conversions inutiles entre les sources renouvelables et les applications finales, évitant ainsi la complexité et les pertes attribuables à l’électronique de puissance traditionnelle.

Cependant, les deux secteurs restent fortement dépendants de ces équipements, notamment pour la conversion du courant alternatif en courant continu via des onduleurs ou des convertisseurs. Le contrôle des harmoniques et le filtrage sont donc essentiels pour garantir la qualité du courant. Par ailleurs, les câbles supraconducteurs n’émettent aucun champ électromagnétique : une solution sûre, stable et sans interférences.

Optimiser le refroidissement et la gestion thermique

Les opérations de refroidissement des composants électroniques de traction, des sous-stations, des serveurs, des batteries et des systèmes UPS présentent des défis permanents pour réduire la consommation d’énergie et atteindre des normes de performance plus élevées.

En comparaison aux câbles résistifs conventionnels, les câbles supraconducteurs sont plus compacts et ne génèrent pas de chaleur. Ces derniers éliminent ainsi le besoin de refroidissement supplémentaire tout en réduisant la charge électrique associée et les émissions de CO₂. Un avantage qui évite ainsi la surchauffe et minimise le gaspillage d’énergie.

Accélérer l’intégration des énergies renouvelables

L’intégration des énergies renouvelables stimule depuis plusieurs années les investissements, avec une utilisation croissante du solaire et de l’éolien dans les gares, dépôts et centres de données — souvent complétée par des installations photovoltaïques sur site et des systèmes de stockage d’énergie par batteries. L’interaction avec les réseaux intelligents, incluant la gestion de la demande, le transfert de charge et l’écrêtement des pics de consommation, se généralise.

La supraconductivité constitue une véritable révolution pour cette intégration. L’association des câbles HTS et du courant continu résout le paradoxe des énergies renouvelables : nous savons produire une énergie propre, mais peinons à la transporter efficacement jusqu’aux zones de forte demande. Les parcs solaires et éoliens se situent souvent loin des centres urbains, et chaque kilowatt perdu en route impose de brûler davantage de combustibles fossiles pour compenser.

Les câbles supraconducteurs en courant continu permettent d’acheminer d’importants courants à basse tension sur plusieurs kilomètres, sans aucune chute de tension — une solution idéale pour relier les sites de production éloignés aux zones urbaines consommatrices.

Cette capacité ouvre la voie à des systèmes énergétiques entièrement décarbonés et modulaires, grâce aux Uninterrupted Power Plants (UPP ou centrales électriques ininterrompues) : des micro-réseaux modulaires intégrant des boucles en courant continu basse tension à câbles supraconducteurs à haute température, pour une fiabilité maximale et un fonctionnement autonome, sans dépendance au réseau principal. Les réseaux ferroviaires comme les centres de données peuvent ainsi fonctionner sur des micro-réseaux 100 % renouvelables, supprimant tout recourt aux sources fossiles et atteignant une neutralité carbone réelle.

Les câbles supraconducteurs transmettent le courant continu sans aucune perte, ce qui en fait la solution idéale pour les panneaux solaires fonctionnant à 1 500 volts en courant continu. Ils assurent une livraison d’énergie optimale, maximisent le rendement des voies ferrées et des salles de données, et s’adaptent parfaitement aux systèmes de stockage BESS, où le courant continu est transmis de manière efficiente grâce à la technologie HTS.

Optimiser la consommation énergétique

La pression croissante des pouvoirs publics et des régulateurs pour réduire la consommation d’énergie et les émissions de carbone pousse les industriels à repenser leurs infrastructures électriques et à concevoir des systèmes plus performants, articulés autour de trois leviers majeurs :

  • L’optimisation énergétique intelligente, combinant la distribution en courant alternatif et en courant continu.
  • Les jumeaux numériques pour la simulation et la modélisation énergétique, avec l’adoption de technologies de réseau innovantes. La supraconductivité fait partie de ces avancées majeures qui participent à la modernisation des infrastructures électriques.
  • La conception modulaire pour faciliter le dimensionnement énergétique et l’isolation des défauts. Les limiteurs supraconducteurs de courant de défaut s’imposent de plus en plus comme une solution clé. Ils permettent le fonctionnement automatisé des postes électriques, sans intervention humaine en cas d’incident, tout en offrant une protection optimale des équipements du réseau.
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2. Transformation concrète – la supraconductivité en action

Une révolution ferroviaire en marche

L’installation pionnière de SNCF Réseau à la gare Montparnasse illustre les bénéfices tangibles de la supraconductivité : une capacité accrue, des pertes d’énergie réduites et une utilisation plus efficiente des ressources électriques.

Conçu pour s’intégrer dans les conduits existants, le câble HTS assure un fonctionnement sans perte et sans impact environnemental, sans nécessiter d’autorisations complexes. Conçu pour absorber les variations de charge sans interruption de service, le système constitue une première mondiale : il résiste à des courants de défaut allant jusqu’à 40 kA en seulement deux centièmes de seconde.

La révolution des data center

Les charges de travail liées à l’intelligence artificielle transforment les data centers, passés du statut de simples « entrepôts de serveurs » à celui d’infrastructures ultrasophistiquées, comparables à de véritables centrales électriques en termes de consommation d’énergie. Chaque rack IA peut absorber entre 30 et plus de 100 kW, certaines dépassant même les 120 kW. Les nouveaux sites sont désormais conçus pour des puissances totales de 500 MW à plus d’un gigawatt — soit l’équivalent de la consommation d’une ville entière.

La supraconductivité apporte une réponse décisive à cette intensification énergétique : elle offre une densité de courant extrêmement élevée, des pertes de transmission quasi nulles et une empreinte nettement plus réduite que les câblages conventionnels. Les gains sont considérables, tant en consommation qu’en coûts d’exploitation. La compacité des systèmes permet de limiter les travaux de génie civil et d’accélérer la mise en service, améliorant ainsi la rentabilité des projets et le retour sur investissement.

Plusieurs acteurs intègrent désormais les systèmes supraconducteurs à leurs études de faisabilité. Les micro-réseaux exploitant cette technologie se développent pour renforcer l’autonomie énergétique des sites et réduire leur dépendance vis-à-vis des opérateurs de réseau, tout en accélérant les délais de déploiement.

L’intégration directe du solaire s’avère particulièrement pertinente : les panneaux photovoltaïques produisent plusieurs centaines de mégawatts renouvelables à 1 500 volts en courant continu. Conçus avec des câbles HTS de 10 kA à 1 500 volts, les micro-réseaux supraconducteurs assurent un transfert continu d’environ 30 MW d’énergie renouvelable, totalement hors réseau, vers les data centers. Couplée à la production verte et au stockage d’énergie dans des micro-réseaux hybrides, la technologie HTS permet aux data centers de fonctionner en continu, de manière durable et indépendante du réseau principal.

La révolution des infrastructures à venir

La supraconductivité redéfinit deux des secteurs les plus critiques de la société en offrant résilience, efficacité et durabilité à grande échelle. En remplaçant le cuivre par des câbles supraconducteurs à courant continu, les réseaux ferroviaires et les data centers bénéficient d’une capacité accrue, de pertes d’énergie réduites, d’une conservation des ressources, d’une transmission sans émissions et d’une sécurité améliorée, le tout dans un format compact.

Cette transformation dépasse le cadre des secteurs individuels et constitue la colonne vertébrale d’un système énergétique entièrement électrifié et durable, dans lequel la production d’énergie renouvelable, le transport efficace et les applications à forte demande s’intègrent avec fluidité.

Des entreprises de premier plan, telles que Nexans, développent des solutions de bout en bout qui soutiennent le déploiement de cette architecture évolutive et pérenne. Une façon de propulser notre transition vers un avenir entièrement électrifié et durable.

Paul Bakhos

Auteur

Paul Bakhos a rejoint Nexans en 2012 en tant que chef de projet au Liban. Il a ensuite occupé diverses fonctions industrielles et corporate au sein du Groupe. Il est aujourd’hui Head of Transformation des Acceleration Units, en charge de l’industrialisation et du passage à l’échelle de technologies telles que la machinerie, la cryogénie et la supraconductivité.

Paul est certifié Project Manager PMP et titulaire d’un MBA de l’ESCP Business School à Paris.

Les systèmes supraconducteurs : une révolution pour les réseaux énergétiques de demain

Électrification de demain
03 octobre 2025
10 min
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Un réseau urbain sous tension

Imaginez que vous branchiez tous vos appareils électroménagers flambant neufs sur un système électrique installé il y a près de cent ans. Un scénario similaire se joue à l’échelle mondiale avec les infrastructures qui vieillissent plus vite qu’elles ne sont remplacées ou modernisées. Le risque de défaillance du système est élevé, et il en va de même pour nos réseaux électriques urbains. Selon les Nations unies, 55 % de la population mondiale vit aujourd’hui dans des zones urbaines. Une proportion qui devrait passer à 68 % d’ici à 2050 avec des communautés citadines qui exigent une électricité ininterrompue, de haute qualité, et un minimum de pannes ou d’interruptions.

Parallèlement, l’adoption croissante des véhicules électriques, des pompes à chaleur et d’autres technologies à faible émission de carbone, combinée à la réduction de la taille des ménages, entraîne une forte augmentation de la consommation d’électricité dans les secteurs résidentiel et industriel. Dans le même temps, une grande partie des infrastructures électriques existantes vieillit et atteint les limites de ses capacités. Les câbles et systèmes de distribution conventionnels, initialement conçus pour les anciens modèles énergétiques centralisés, sont aujourd’hui soumis à des contraintes croissantes en raison des flux d’énergie décentralisés et des demandes de charge plus élevées. En d’autres termes, il existe un décalage croissant entre ce que les réseaux énergétiques peuvent fournir et ce dont les villes actuelles ont besoin.

Plusieurs contraintes systémiques entravent la modernisation efficace des réseaux urbains :

  • Contraintes d’espace : les systèmes de câblage conventionnels nécessitent un espace conséquent ainsi que des équipements spécialisés. Or, les couloirs souterrains sont déjà saturés par les infrastructures existantes, rendant ainsi complexe la pose de nouveaux câbles.
  • Coûts croissants : les restrictions environnementales, l’acquisition de terrains et les frais de location peuvent ajouter des centaines de milliers de dollars au coût des projets.
  • Goulots d’étranglement du réseau : les contraintes environnementales et de proximité limitent considérablement le raccordement de nouvelles sources d’énergie renouvelables, faisant ainsi obstacle à la transition énergétique qu’ils doivent justement faciliter.
  • Acceptabilité sociale limitée : les travaux de construction nécessaires à l’installation de nouveaux câbles s’accompagnent souvent de nuisances sonores, d’embouteillages et de préoccupations environnementales, ce qui entraîne une opposition citoyenne croissante.
  • Le constat est sans appel : pour réussir la transition énergétique, il faut repenser radicalement les infrastructures électriques à l’aide de technologies innovantes qui permettent d’équilibrer la demande croissante, la résilience du système et la qualité de vie urbaine. C’est là qu’interviennent les systèmes supraconducteurs.

La technologie supraconductrice, une réponse aux défis du réseau électrique urbain

Les câbles HTS : une transmission sans résistance

La technologie des supraconducteurs à haute température (HTS) tire sa puissance transformatrice de sa propriété fondamentale : la supraconductivité. Avec une résistance électrique pratiquement nulle, ces câbles peuvent transporter des courants extrêmement élevés dans des sections beaucoup plus petites que les conducteurs en cuivre ou en aluminium. À titre d’exemple, un seul câble de 17 centimètres de diamètre peut supporter jusqu’à 3,2 gigawatts à haute tension. Cela équivaut à la production d’environ trois réacteurs nucléaires – et plusieurs centaines de mégawatts en souterrain à moyenne tension. Cette capacité permet d’alimenter de grandes villes sans avoir à ajouter de nouvelles lignes haute tension.

Cette absence de génération de chaleur élimine le besoin de larges dégagements thermiques et de systèmes de ventilation. Les systèmes HTS peuvent ainsi être installés dans de simples tranchées plutôt que dans des tunnels construits spécialement à cet effet. Leur encombrement réduit signifie que les couloirs nécessaires sont jusqu’à dix fois plus étroits que pour les systèmes conventionnels. Ils ne génèrent également aucune interférence électromagnétique et n’émettent aucun champ magnétique externe. Des atouts qui les rendent sûrs pour les autres infrastructures dans ces espaces confinés.

Au-delà des avantages liés à leur installation, les systèmes HTS offrent une grande flexibilité opérationnelle. Un système conventionnel de 400 kilovolts (kV) peut être remplacé par un système supraconducteur de 132 ou 275 kV. Cette substitution se fait sans perte de capacité et à moindre coût, principalement grâce à l’économie réalisée sur les gros transformateurs de 400 kV dans la sous-station. De plus, le système de câbles, y compris les systèmes auxiliaires, étant modulaire, la même conception de câble fonctionne aussi bien pour les réseaux urbains compacts que pour le transport à longue distance.

 Les SFCL : une protection instantanée contre les défauts

Les propriétés supraconductrices peuvent également être utilisées pour atténuer les surintensités, presque instantanément. Les limiteurs de courant de défaut supraconducteurs (SFCL) offrent une protection essentielle contre les courants de défaut qui peuvent endommager des équipements critiques tels que les transformateurs et les appareillages de commutation. En cas de court-circuit ou de défaut, les SFCL limitent instantanément et automatiquement les courants excessifs sans intervention mécanique ni perturbation de tension. Les SFCL exploitent les propriétés intrinsèques des supraconducteurs. En quelques millisecondes, ils passent d’un état sans résistance à un état résistif. Ils limitent ainsi le courant de défaut avant qu’il n’endommage les équipements sur la même branche. Les SFCL peuvent s’intégrer à n’importe quel système électrique. Ils améliorent la fiabilité du réseau et optimisent la protection des infrastructures. Ils réduisent également le vieillissement des équipements causé par le stress thermique.

 

La preuve par l’exemple : des applications réussies

Plusieurs projets opérationnels démontrent la maturité technologique et le potentiel transformateur des systèmes supraconducteurs dans divers environnements urbains. En voici trois exemples :

Projet AmpaCity, Allemagne

Nexans a fabriqué et déployé en 2014 la plus longue liaison par câble supraconducteur au monde. Elle comprend un câble HTS triphasé de 10 kV d’une capacité de 40 MVA, en remplacement d’un circuit conventionnel de 110 kV, et intégrant un limiteur de courant de défaut supraconducteur. Les sept années de service continu ont prouvé la fiabilité à long terme de la technologie supraconductrice.

Projet LIPA, États-Unis

Ce projet a permis de démontrer les capacités de la supraconductivité dans les infrastructures électriques américaines. En 2008 et 2012, Nexans a développé et livré des systèmes complets de câbles supraconducteurs 138 kV CA, comprenant l’âme du câble, l’enveloppe cryogénique et les terminaisons, tout en supervisant l’installation et la mise en service.

Projet Best Paths

Nexans a conçu et construit une boucle supraconductrice 320 kV CC pionnière, composée d’un câble monopôle de 30 mètres transportant un courant de 10 kA pour une capacité nominale de 3,2 GW. Le projet comprenait des essais de tension complets à 1,85 fois la tension nominale (jusqu’à 592 kVDC) et des essais d’impulsion. Cela a permis d’obtenir la première qualification au monde d’une boucle supraconductrice HVDC 320 kV à grande échelle. L’essai a été réalisé sur une plateforme dédiée. Le circuit HVDC atteint une puissance de 6,4 GW, répartis sur deux monopôles. Il s’agit de la plus grande capacité de transport d’électricité jamais démontrée.

Ces réalisations concrètes démontrent que les supraconducteurs sont passés d’une technologie expérimentale à une solution industrielle, capable de transformer le transport et la distribution d’électricité en milieu urbain.

 

Construire le réseau électrique de demain

Avec des projets opérationnels qui prouvent leur fiabilité et des villes confrontées à une pression croissante pour s’électrifier rapidement, les systèmes supraconducteurs représentent plus qu’une simple mise à niveau. Ils constituent un changement fondamental dans la manière dont les réseaux urbains peuvent être conçus et déployés.

Plutôt que de lutter contre les contraintes d’espace et la résistance des communautés avec des solutions conventionnelles, les services publics peuvent désormais construire des réseaux plus petits, plus silencieux et plus efficaces qui soutiennent réellement la transition énergétique qu’ils sont censés permettre. Les systèmes supraconducteurs offrent aux villes un moyen pratique de répondre à la demande croissante en électricité tout en atteignant leurs objectifs de décarbonation : une infrastructure prête pour l’avenir, pour une énergie urbaine résiliente et durable.

Picture of Beate West

Auteurs

Dr. Beate West est Head of Engineering for Superconducting Systems chez Nexans, à Hanovre. Elle a rejoint Nexans en 2010 en tant qu’ingénieure de recherche. Elle est responsable de la conception des câbles supraconducteurs et des limiteurs de courant de défaut.

Beate est titulaire d’un diplôme et d’un doctorat en physique de l’Université de Bielefeld.

Picture of Arnaud Allais

Dr. Arnaud Allais est Chief Technology Officer Machinery, Cryogenic and Superconducting Systems chez Nexans.  Arnaud est une autorité mondialement reconnue dans les technologies avancées des réseaux électriques et la supraconductivité à haute température (HTS). Fort de plus de vingt ans d’expérience, il pilote l’innovation et le développement stratégique de systèmes supraconducteurs avancés qui façonnent l’avenir du transport d’énergie.

Arnaud a obtenu son doctorat en génie des matériaux à l’École des Mines de Paris, en collaboration avec Alcatel, où il s’est spécialisé dans la modélisation des fils supraconducteurs Bi2223 Powder-in-Tube. Il est également diplômé en ingénierie de l’énergie et des matériaux de l’École d’ingénieurs d’Orléans. Tout au long de sa carrière chez Nexans, Arnaud a occupé plusieurs postes de direction clés, notamment celui de Directeur du Centre de Recherche Nexans et de Directeur de programme R&D au SuperGrid Institute – une coentreprise de recherche et développement avec GE, Alstom, EDF et de grandes universités françaises.

La révolution du réseau électrique : comment les supraconducteurs transformeront l’énergie de demain pour une transition sûre et efficace
Électrification de demain
15 septembre 2025
15 min
Superconductivity and EV, in cities

Au moins 3 000 gigawatts de projets d’énergie renouvelable sont, à l’heure actuelle, en attente de raccordement dans le monde entier, dont 1 500 gigawatts à un stade avancé. Ce volume correspond à cinq fois la capacité solaire et éolienne ajoutée en 2022, alors même que les données disponibles ne couvrent qu’une partie de cette capacité.

Alors, si la production d’énergie durable n’est pas le problème, quel est-il ? Le véritable obstacle réside dans le transport de cette énergie du lieu de production vers celui où elle est nécessaire. Or, ces goulots d’étranglement constituent l’un des plus grands risques pour atteindre les objectifs de neutralité carbone, la sécurité énergétique et la résilience climatique.

La transition énergétique exige des infrastructures à la hauteur de l’ampleur et de l’urgence du défi. C’est là qu’interviennent les supraconducteurs, une (super) solution révolutionnaire capable d’aligner la capacité du réseau sur les ambitions.

Le défi des infrastructures

Alors que la demande en véhicules électriques, en production d’hydrogène et en systèmes de chauffage et de climatisation s’accélère, les réseaux électriques sont soumis à une pression sans précédent. Cependant, une grande partie des réseaux câblés actuels, notamment en Europe occidentale, en Amérique du Nord et au Japon, datent déjà de plusieurs décennies et n’ont jamais été conçus pour supporter les charges actuelles.

Prenons l’exemple d’un opérateur de réseau de distribution à New York, dont le réseau câblé a plus de 50 ans et fonctionne presque à pleine capacité. L’ajout de nouvelles charges, provenant de véhicules électriques et de pompes à chaleur, accélère non seulement le vieillissement des câbles existants, mais limite également la capacité de connexion de nouvelles productions renouvelables en raison de contraintes thermiques et de tension. Le remplacement ou la modernisation de ces câbles par des solutions haute tension conventionnelles nécessite des travaux d’excavation importants en zone urbaine, où le sous-sol est déjà encombré d’infrastructures de télécommunications, d’eau, de gaz et de transport.

Même lorsque l’installation est techniquement possible, les restrictions environnementales, les frais de location de voies et les frais de gestion du trafic peuvent augmenter le coût des projets de plusieurs centaines de milliers de dollars. L’acquisition de terrains pour des tracés de câbles plus larges complique encore la tâche, en particulier lorsque les emprises existantes ne permettent pas l’espacement nécessaire aux câbles conventionnels, qui nécessitent une séparation importante pour gérer les effets de la chaleur et les interférences électromagnétiques.

Parallèlement, les exigences de sécurité et de fiabilité ne cessent de croître. Les réseaux doivent fournir de l’électricité sans coupures, défaillances en cascade ou pannes de courant. Ils doivent gérer les courants de défaut susceptibles d’endommager des actifs critiques tels que les transformateurs et les appareillages de commutation. Face aux attentes croissantes du public, les réseaux doivent minimiser les interférences électromagnétiques, réduire les émissions de CO₂, recycler les équipements obsolètes de manière responsable et rassurer les populations quant à la sécurité.

Ce scénario se joue dans les grandes villes du monde entier, tandis que les zones rurales sont confrontées à leurs propres contraintes d’infrastructures. Répondre aux besoins d’électrification à grande échelle nécessitera des mises à niveau d’infrastructures massives : les réseaux auront besoin d’environ 80 millions de kilomètres de câbles neufs ou rénovés d’ici à 2040, et les systèmes conventionnels ne peuvent à eux seuls répondre à la demande.

data center

L’enjeu majeur des data centers

Les data centers (centres de données) sont devenus le cœur de l’infrastructure numérique, fonctionnant avec une puissance de calcul, des capacités de stockage et des besoins énergétiques considérables. Cependant, l’augmentation de leur encombrement et de leur consommation d’énergie entraîne des défis majeurs en termes d’efficacité, de gestion thermique, d’utilisation des sols et d’impact environnemental. La demande de services numériques explose. Face à la croissance exponentielle de l’économie numérique, les centres de données deviennent l’épine dorsale de l’infrastructure numérique mondiale. Des centres de données hyperscale, de l’ordre du gigawatt émergent pour répondre à la demande croissante de calcul, notamment grâce à l’intelligence artificielle, aux services cloud et à l’analyse avancée. Ces installations de nouvelle génération repoussent les limites de l’infrastructure électrique traditionnelle, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des data centers.

Les besoins en énergie augmentent rapidement, les nouveaux centres de données hyperscale étant conçus pour des capacités approchant ou dépassant les 5 gigawatts, soit un ordre de grandeur supérieur à celui des installations de la génération précédente. Cette envergure pose des défis majeurs en matière de distribution d’énergie, de gestion thermique, d’utilisation des sols, d’émissions de carbone et d’investissement. La dépendance actuelle aux systèmes de câblage conventionnels en cuivre est de moins en moins durable.

Le goulot d’étranglement en chiffres

3 000 GW

de projets d’énergies renouvelables sont bloqués dans les files d’attente de raccordement au réseau dans le monde, soit cinq fois la capacité solaire et éolienne ajoutée en 2022

1 500 GW

de ce total sont à un stade avancé

80m km

de câbles neufs ou rénovés sont nécessaires d’ici à 2040 pour atteindre les objectifs d’électrification

Environ

10 %

de l’électricité est perdue lors du transport sur de longues distances, soit environ 180 TWh par an en Europe

> 5 GW

de capacité énergétique pour les nouveaux centres de données hyperscale, soit un ordre de grandeur supérieur à celui des installations de la génération précédente. Cette envergure pose des défis majeurs en matière de distribution d’énergie, de gestion thermique, d’aménagement du territoire, d’émissions de carbone et d’investissement

La solution supraconductrice

Les câbles supraconducteurs à haute température (HTS) et les limiteurs de courant de défaut représentent une approche fondamentalement différente de la transmission d’énergie. Cette technologie exploite la perte totale de résistance électrique qui se produit dans certains matériaux à des températures extrêmement basses, l’une des propriétés clés de la supraconductivité.

Les matériaux HTS nécessitent un refroidissement à environ -200 °C, généralement à l’azote liquide. « Haute température » ​​fait ici référence à la première génération de supraconducteurs, qui nécessite des températures inférieures à -243 °C pour fonctionner. L’azote liquide circule dans des enveloppes cryogéniques, une gaine thermiquement isolée qui entoure le câble. Relativement peu coûteux, ce dernier est sans danger pour l’environnement et plus facile à gérer que de nombreux fluides de refroidissement industriels. Plus important encore, l’énergie économisée grâce à l’élimination des pertes de transmission dépasse l’énergie nécessaire au maintien de l’environnement cryogénique.

L’électricité qui circule actuellement dans votre maison a parcouru des centaines de kilomètres de câbles résistifs conventionnels, perdant environ 10 % de sa puissance en cours de route. Ces déchets, environ 180 TWh par an rien qu’en Europe, suffisent à alimenter trois grandes villes. Les câbles HTS consomment dix fois moins d’énergie pour fournir de l’électricité.

Pourquoi choisir des câbles supraconducteurs ?

Pour les réseaux modernes, les systèmes HTS offrent des avantages considérables par rapport aux alternatives conventionnelles, notamment en milieu urbain dense :

  • Gain d’espace et économie : les câbles HTS ne génèrent ni chaleur ni champs électromagnétiques, quelle que soit la charge le long du tracé, de sorte qu’aucune séparation de phase n’est nécessaire. Les câbles peuvent être enterrés à n’importe quelle profondeur et à proximité d’autres réseaux multi-énergies sans tunnels coûteux ni conduits spécialisés, réduisant ainsi les emprises jusqu’à un dixième de la largeur des systèmes conventionnels. Dans les villes où le coût du terrain se chiffre en dizaines de milliers de dollars par mètre, cet avantage est révolutionnaire.
  • Capacité de transport considérable : un seul câble HTS peut transporter plus de 3 gigawatts. Moins de circuits et des mises à niveau minimales des sous-stations sont nécessaires, tandis que les rénovations permettent de multiplier la capacité des tunnels sans travaux majeurs, avec des pertes électriques minimales, voire nulles, en courant continu.
  • Empreinte environnementale réduite : des travaux d’excavation réduits et une obtention de permis simplifiée permettent de raccourcir les délais des projets et de réduire l’opposition du public.
  • Résilience : Les câbles supraconducteurs entièrement blindés sont résistants aux intempéries, hautement sécurisés et quasiment exempts de champs électromagnétiques parasites. Ainsi, la disponibilité de l’électricité est préservée même en cas de perturbation du réseau.

Une équation gagnante !

Superconductivity and train stations, in cities, data centers

Transformation du réseau au-delà de la capacité

Contrairement aux réseaux conventionnels, confrontés à des difficultés avec des ressources énergétiques décentralisées comme le solaire sur les toits, les piles à combustible et les parcs éoliens isolés, les systèmes HTS permettent aux réseaux d’absorber l’énergie de n’importe quelle source et de faciliter les flux d’électricité dictés par le marché.

Les limiteurs de courant de défaut supraconducteurs (SFCL) sont invisibles dans le réseau en conditions normales et passent automatiquement à un état hautement résistif en cas de défaut, limitant ainsi les courants dangereux et réduisant le niveau de courant de court-circuit supporté par tous les équipements du poste avant l’activation des disjoncteurs. Cette technologie exploite le comportement intrinsèque des supraconducteurs et ne nécessite ni contrôle actif ni surveillance.

Cette technologie favorise la transition vers des réseaux plus intelligents et plus flexibles, où la demande peut s’ajuster à de multiples sources d’approvisionnement. Les densités énergétiques urbaines peuvent augmenter considérablement avec un minimum de perturbations publiques, grâce aux SFCL, capables d’absorber l’augmentation du courant de court-circuit induite par l’ajout de nouvelles sources et de nouvelles charges sur le réseau.

En ce qui concerne les infrastructures de recharge des véhicules électriques, les avantages en termes de capacité et d’efficacité deviennent particulièrement importants à mesure que la vitesse de recharge augmente et que le déploiement s’intensifie. Les processus d’électrification industrielle nécessitant une alimentation électrique fiable et en grande quantité peuvent être pris en charge sans les investissements massifs en infrastructures que nécessiteraient les systèmes conventionnels.

Du côté des data centers, cela offre des avantages considérables en matière de transport, de distribution et de conception d’infrastructures. Fournir une alimentation électrique efficace et fiable dans des espaces restreints est une préoccupation majeure de l’industrie, et les systèmes de câbles supraconducteurs offrent une solution prometteuse. Avec une résistance électrique nulle, une capacité de courant ultra-élevée et un encombrement réduit, les câbles HTS peuvent simplifier radicalement les infrastructures électriques, réduire les charges thermiques et soutenir les objectifs plus larges de durabilité et d’électrification. Les câbles supraconducteurs (systèmes supraconducteurs à haute température [HTS]) représentent une solution transformatrice pour le transport d’électricité au sein et autour des centres de données à grande échelle. Ces conducteurs avancés peuvent transmettre l’électricité avec une résistance quasi nulle, éliminant ainsi les pertes d’énergie et la production de chaleur inhérentes aux systèmes traditionnels à base de cuivre.

Réseaux plus intelligents et plus denses

  • Sources d’énergie disponibles en tout lieu : les câbles HTS gèrent les panneaux solaires sur toits, les piles à combustible et les parcs éoliens isolés.
  • Protection automatique : les SFCL limitent instantanément les courants de défaut, sans aucun contrôle actif.
  • Réseaux intelligents et résilients : les SFCL permettent d’augmenter l’offre et la demande, améliorant ainsi la fiabilité et favorisant l’intégration de la production décentralisée ou à distance.
  • Prêts pour l’électrification : les réseaux accompagnent la montée en puissance de la recharge des véhicules électriques et les charges industrielles sans nécessiter d’infrastructures lourdes supplémentaires.

Prêt pour une révolution des réseaux supraconducteurs ?

Les exigences en matière d’infrastructures, la maturité technologique et une solide analyse de rentabilité s’alignent pour soutenir l’adoption généralisée des HTS. Des entreprises comme Nexans, implantées en Allemagne, en France et en Norvège, ont développé une expertise de pointe sur l’ensemble de la technologie supraconductrice et contribuent à l’élaboration de normes internationales qui accéléreront son déploiement mondial.

La question n’est pas de savoir si la technologie supraconductrice transformera les réseaux électriques, mais de savoir avec quelle rapidité les services publics, les gouvernements et les investisseurs reconnaîtront cette opportunité. Les opérateurs de réseaux qui agiront rapidement bénéficieront d’avantages concurrentiels significatifs en termes d’efficacité, de fiabilité et de capacité. Ceux qui patienteront risqueront de se retrouver limités par les limitations d’infrastructure que la technologie supraconductrice est censée résoudre.

Photo of Yann Duclot

Auteur

Yann Duclot est Directeur des Acceleration Units chez Nexans. À ce poste, il supervise les Acceleration Units de Nexans, qui regroupent deux entités centrées sur la transition énergétique : Nexans Solar Technologies (NST) et Nexans Machinery, Cryogenics and Superconductivity (MCS). Yann dirige une équipe de 65 personnes basées en France et en Allemagne, spécialisée dans l’ingénierie et la fabrication de technologies nouvelles et de rupture (supraconductivité, cryogénie, trackers solaires), afin d’accélérer la croissance sur les marchés à fort potentiel de la transition énergétique.

Yann a commencé sa carrière chez Nexans en 2000 et, après une courte expérience chez Cavotec en tant que Chief Marketing Officer, il fait aujourd’hui partie du Groupe depuis 14 ans. Fort de plus de 25 ans d’expérience en direction de business units, en transformation organisationnelle et en management de l’innovation, il a joué un rôle clé dans la montée en puissance des activités et la croissance rentable de l’entreprise. Il est titulaire d’un Master of Science de Grenoble École de Management (GEM).

Explorez plus loin l’innovation supraconductrice

Poursuivez votre exploration des technologies supraconductrices qui redéfinissent le paysage énergétique à travers nos articles — des systèmes révolutionnaires qui transforment les réseaux électriques et les connexions sous-marines favorisant la transition énergétique, jusqu’aux avancées qui propulsent la nouvelle génération de réseaux ferroviaires et de centres de données durables et performants.

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  • Les techniciens gagnent en autonomie grâce au design centré sur l’humain et aux outils numériques
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    05 septembre 2025
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    human-centric design and digital tools

    La transition énergétique mondiale s’accélère de jour en jour, mais la réussite de cette profonde mutation exige davantage que des câbles, du cuivre et des capitaux : elle repose avant tout sur les milliers de techniciens qualifiés qui installent les accessoires d’énergie nécessaires à l’électrification — les jonctions, extrémités et connecteurs qui articulent nos réseaux électriques.

    Or la hausse de la demande énergétique sollicite très fortement cette catégorie de travailleurs. Dans la perspective d’un triplement des investissements dans les réseaux d’ici 2030, le principal goulet d’étranglement ne réside pas dans l’approvisionnement en matériaux, mais bien dans la pénurie croissante de techniciens qualifiés et compétents. Le succès de la transition énergétique n’est plus seulement conditionné par l’accès aux technologies ou aux ressources nécessaires : désormais, il dépend avant tout des hommes et des femmes capables de bâtir et d’entretenir le réseau.

    Pour relever ce défi, le secteur de l’énergie doit actionner trois leviers stratégiques :

    1

    Les outils, les composants et les conditionnements doivent être repensés pour que les opérations d’installation, de maintenance et de réparation soient plus rapides, plus sûres et plus intuitives.

    2

    Les technologies numériques, et notamment l’intelligence artificielle (IA), doivent être pleinement intégrées afin d’automatiser les contrôles de qualité, de minimiser les erreurs et de proposer aux installateurs un accompagnement en temps réel au cours de leurs interventions.

    3

    Les technologies immersives telles que la réalité augmentée (RA) doivent être mobilisées pour renforcer les formations pratiques, prévenir les erreurs d’installation, et faciliter les diagnostics en temps réel et l’assistance à distance.

    Placer l’humain au cœur du design produit : une condition nécessaire pour la fiabilité des réseaux

    Les techniciens en réseaux électriques sont en première ligne de la transition énergétique. Pour autant, les produits qu’ils mettent en œuvre ne tiennent pas toujours compte des réalités de leur métier : les défauts d’ergonomie, les interfaces peu intuitives et les séquences d’installation complexes sont source de fatigue, de taux d’erreur élevés et de coûteuses interventions correctives. De fait, près de 75 % des pannes de réseau sont imputables à des problèmes d’installation d’accessoires.

    En adoptant le point de vue de l’installateur, le développement produit peut devenir un catalyseur stratégique pour la performance des réseaux. Au-delà du respect des cahiers des charges techniques, le design centré sur l’humain se focalise sur la simplicité de mise en œuvre des produits, sur leur comportement en conditions réelles, et sur l’expérience concrète des installateurs.

    Ce processus débute par des observations de terrain pour mieux appréhender les gestes des techniciens, la manière dont ils emploient leurs outils et les sollicitations physiques auxquelles ils sont soumis. Ayant identifié les irritants dans l’installation des câbles et accessoires, les designers sont mieux en mesure de réduire la complexité des processus et d’optimiser les produits pour leurs conditions réelles d’utilisation.

    Exemples concrets :

    • Une jonction MT repensée pour que l’installation s’effectue en 17 étapes au lieu de 65, réduisant considérablement le risque d’erreur ;
    • Un système ergonomique de jonctions modulaires qui simplifie leur manipulation et minimise la pénibilité des opérations.

    Ces modifications s’appuient sur les retours d’expérience des techniciens et sur des essais d’ergonomie pour élaborer des procédures d’installation plus sûres, plus rapides et plus constantes.

    La conception centrée sur l’humain s’étend également au conditionnement et à la logistique. Des solutions intuitives telles que les poignées intégrées, les tourets à dévidoir ou les bobines universelles facilitent le transport et la manutention. En recentrant la perspective sur l’humain, ces innovations low tech participent efficacement à la résilience et à la durabilité des réseaux.

    human-centric design and digital tools

    Les outils numériques : une assistance augmentée pour les installateurs qualifiés

    Si l’ergonomie du design minimise le stress physique des travailleurs sur le terrain, les outils numériques leur apportent également une assistance cognitive et procédurale en accompagnant en temps réel les opérations d’installation et de contrôle de conformité.

    Des applications d’IA comme Infracheck permettent aux techniciens de contrôler la qualité d’une installation à l’aide d’un simple smartphone ou d’une tablette. Ce système associe la capture d’images et l’analyse par IA pour générer instantanément une évaluation qualitative de l’assemblage des jonctions, du positionnement des câbles et de leur conformité aux préconisations d’installation. Ceci minimise le risque d’erreur humaine et les délais de vérification, et pallie l’inexpérience des techniciens moins chevronnés en décomposant clairement les différentes étapes de chaque procédure.

    La RA franchit un palier supplémentaire dans l’assistance numérique avec un accompagnement et des retours en temps réel qui améliorent considérablement les formations pratiques et la qualité des installations. En associant des instructions visuelles et des évaluations instantanées, l’aide à distance par RA optimise la précision des opérations et des diagnostics, tout en accélérant l’apprentissage concret du métier. Tandis que les fournisseurs d’énergie s’empressent d’intégrer de nouvelles équipes de terrain et d’opérer leur montée en compétences, l’AR s’impose comme un outil essentiel d’apprentissage des pratiques et de formation professionnelle continue.

    En pratique :

    • Un fournisseur d’énergie de premier plan mobilise l’AR pour assister ses équipes de terrain lors d’interventions sur des tableaux BT ;
    • La RA est également déployée dans les formations intégrées au travail afin de résorber les écarts de compétences et de renforcer le respect des préconisations sans nécessiter la présence physique d’un superviseur.

    Tous ces outils révolutionnent aujourd’hui les interventions de terrain. Celles-ci ne sont plus simplement réactives et sujettes aux erreurs, mais proactives, accompagnées et précises.

    La RA, une innovation de rupture pour l’installation de câbles

    Voici quelques illustrations de la manière dont la RA transforme les opérations d’installation et de maintenance au quotidien :

    Autonomiser les agents de terrain, un levier stratégique pour l’électrification

    L’ensemble de ces innovations partage une intention commune : celle d’autonomiser les travailleurs qui réalisent l’électrification.

    Le défi des énergies propres ne sera pas remporté par les infrastructures seules. Nous devons également investir dans les hommes et les femmes qui les bâtissent, et leur fournir tous les outils, les compétences et le soutien nécessaires pour assurer leur succès sur le terrain.

    Le basculement vers le design intuitif et les outils numériques intelligents n’est donc plus une option, mais une nécessité fondamentale. La résilience future des réseaux sera déterminée non par les équipements qui les constituent, mais par celles et ceux qui les installent et par la qualité de leurs interventions.

    L’avenir de l’électrification appelle bien davantage qu’un entrelacs de machines et de câbles. Il sera façonné par des mains habiles, augmentées d’outils toujours plus intelligents.

     

    Nexans se place aux avant-postes de cette mutation en intégrant la conception centrée sur l’humain et les technologies de rupture dans l’ensemble de son catalogue. Depuis les jonctions ergonomiques jusqu’aux plateformes de partage des savoirs animées par l’IA, Nexans accompagne les gestionnaires de réseau pour mieux équiper leurs effectifs et leur permettre de travailler plus rapidement, avec davantage d’assurance et en toute sécurité.

    Photo of Moussa Kafal

    Authors

    Moussa Kafal dirige le portefeuille Fiabilité du Réseau chez Nexans, menant le développement et le déploiement mondial de solutions avancées qui améliorent la performance, l’intégrité et la résilience des réseaux électriques. Titulaire d’un doctorat en ingénierie et un Executive Master d’HEC Paris, il allie une expertise technique approfondie à un sens stratégique pour accélérer la transformation des systèmes énergétiques. Moussa supervise des initiatives clés en Europe, en Amérique du Nord, en Amérique latine et en APAC, positionnant Nexans comme un fournisseur de solutions de réseaux intelligents de premier plan dans un paysage d’infrastructure numérique en évolution rapide.

    Photo of Maxence Astier

    Maxence Astier est Responsable Technique de la technologie Cold-Shrink chez Nexans. Il possède une solide expérience en R&D dans le secteur de l’énergie et des infrastructures électriques. Depuis son arrivée en 2015, il a occupé des postes stratégiques allant de la conception logicielle et du développement de systèmes embarqués à la direction de projets dans le domaine des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE).

    De 2020 à 2023, Maxence a été Directeur des Opérations IRVE, supervisant le déploiement et l’exploitation de réseaux de recharge pour véhicules électriques. Auparavant, il a piloté des projets d’innovation en R&D dans ce domaine, alliant expertise technique en systèmes embarqués et engagement en faveur de la mobilité électrique. Maxence est reconnu pour son leadership transversal, son esprit d’innovation dans l’e-mobilité, ainsi que sa forte expertise à la fois en systèmes matériels et logiciels.

    Accessoires intelligents : vers des réseaux électriques plus fiables et plus performants
    Électrification de demain
    25 juillet 2025
    7 min
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    L’accélération inédite de l’électrification met à rude épreuve les réseaux électriques installés il y a plus de trente ans. Souvent obsolètes, ils peinent à faire face aux pics de demande prolongés tout en maintenant le niveau d’efficacité et de fiabilité attendus.

    Dans ce contexte de plus en plus tendu, tous les maillons de la chaîne ont un rôle à jouer. Or, certains de ces composants essentiels (et vulnérables) sont largement méconnus.

     

    Malgré toute l’attention dont on entoure les câbles et les transformateurs, les composants des réseaux électriques les plus négligés et enclins à connaître des défaillances sont ceux qui, dans l’ombre, assurent l’interconnexion des différentes parties.

    Alors que plus de 70 % des pannes des réseaux de distribution ont lieu au niveau des jonctions, il est très difficile de mener leur inspection en raison du manque de faible visibilité.

    Discrets mais essentiels, ces connecteurs enfouis à plusieurs mètres sous les rues ou au fond des océans contribuent au transport de l’électricité dans le plus grand anonymat. Toute panne peut entraîner des réparations onéreuses, de longues indisponibilités et des interruptions fréquentes des services. Ainsi, les opérateurs des réseaux font tout pour éviter cet effet domino et ses conséquences financières.

    Pourquoi les pannes surviennent-elles au niveau de ces connexions ? Et surtout, comment les éviter ?

    Les accessoires : une raison méconnue des pannes de réseau

    Nous avons tendance à penser que les pannes des réseaux électriques sont dues à la défaillance des câbles ou des transformateurs, mais c’est rarement le cas. En réalité, les accessoires (connecteurs de câbles, jonctions et extrémités) sont à l’origine de l’immense majorité des pannes.

    Au fil du temps, ces composants font l’objet de détériorations liées à la fatigue thermique, aux contraintes mécaniques, aux vibrations, à l’humidité et, dans de nombreux cas, à des pratiques d’installation inappropriées telles que le désalignement ou le serrage excessif. Or, comme nous le savons, il est très complexe de détecter l’emplacement précis d’une panne. En raison du manque de visibilité et de l’absence de données, les activités de dépannage coûtent du temps et de l’argent.

    Ainsi, la réparation d’une panne sur un connecteur de câble MT se situe, en règle générale, entre 10 000 et 50 000 €.

     

    Pannes des systèmes d’accessoires : trois raisons principales

    Ces mécanismes de défaillance soulignent la part immense des risques opérationnels qu’endossent, dans les réseaux moyenne tension, ces accessoires aux dimensions pourtant négligeables. Le constat est d’autant plus frappant que leurs fonctions dépassent largement la question de la fiabilité. Ces mécanismes jouent aussi un rôle essentiel dans la performance, la sécurité et la préparation des réseaux électriques aux enjeux de demain.

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    Les accessoires, un composant de plus en plus stratégique pour les réseaux modernes

    Alimentation des méga centres de données, éclairage des villes, aide aux systèmes de transports : les accessoires jouent un rôle central dans de nombreux secteurs. Or les contraintes sont particulièrement élevées pour les composants les plus âgés, dont la plupart n’avaient pas été conçus pour faire face aux fréquentes hausses de la demande enregistrées à l’heure actuelle.

    Selon le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité (ENTSO-E), plus de 60 % des composants des réseaux d’Europe affichent plus de trente ans de service. Or, ces composants vieillissants sont censés contribuer à un approvisionnement électrique continu dans un environnement où toute indisponibilité est devenue inacceptable.

     

    Les répercussions du vieillissement des composants sur les réseaux électriques

    En Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas, jusqu’à 80 % des pannes enregistrées sur les câbles moyenne tension sont dues à des jonctions défaillantes, selon les chiffres des opérateurs nationaux (analyse Unareti des pannes de réseaux, 2022).

    À l’instar du secteur des télécommunications, celui de l’énergie doit progressivement adopter la visibilité en temps réel, la maintenance prédictive et le diagnostic intelligent continu afin de répondre aux enjeux d’un réseau moderne.

    Accessoires intelligents : des maillons faibles anonymes devenus des agents stratégiques de la résilience des réseaux électriques

    Pour cibler ces vulnérabilités et moderniser les stratégies de maintenance des réseaux, les opérateurs misent sur les accessoires, qui se muent en composants intelligents.

    Les accessoires tels que les jonctions et les connecteurs, aux dimensions modestes, sont souvent le maillon faible des infrastructures de réseau, une caractéristique accentuée par leur exposition à un environnement hostile. En outre, ils ont longtemps été considérés comme des composants passifs.

    Depuis peu, le périmètre de leurs fonctions s’agrandit. Face au vieillissement des installations et au coût grandissant des coupures, ils se voient doter d’une intelligence qui contribue à la maintenance prédictive. Équipés de capteurs reliés à des plateformes de suivi, les accessoires intelligents actuels favorisent une détection précoce des pannes et livrent des données de performance en temps réel. Ces fonctionnalités permettent aux opérateurs de délaisser la maintenance réactive au profit d’une gestion proactive du réseau.

    Les opérateurs ayant adopté ces technologies ont déjà fait part d’un raccourcissement perceptible de la durée des coupures et des interventions d’urgence, ainsi que d’une baisse du montant global des frais d’exploitation.

    La technologie au cœur des accessoires intelligents

    Si ces composants passifs ont pu devenir des accessoires intelligents, c’est grâce à des technologies de nouvelle génération. Ces innovations offrent aux opérateurs des capacités de visibilité en temps réel grâce auxquelles ils peuvent anticiper les pannes au lieu de devoir réagir une fois qu’elles sont survenues.

    Pour répondre à ces attentes, les producteurs proposent désormais des systèmes d’accessoires plus avancés, parmi lesquels :

    • des jonctions, extrémités et connecteurs intelligents, dotés de capteurs embarqués permettant de mesurer la tension et la température, ainsi que de détecter les décharges partielles
    • des tableaux de bord prédictifs, capables de signaler des risques sur la base des données historiques et des informations en temps réel
    • une intégration parfaite avec les jumeaux numériques, les outils mobiles de diagnostic et les plateformes SCADA, offrant une visibilité globale du réseau.

    Ensemble, ces technologies contribuent à la transition vers des stratégies de maintenance proactives et une optimisation du réseau fondée sur les données, permettant des diagnostics plus rapides, des analyses plus précises des causes fondamentales et moins de coupures inattendues.

    Comment ces accessoires, autrefois passifs, sont-ils devenus intelligents ? Trois technologies sont au cœur de cette transformation qui contribue à une nouvelle stratégie de maintenance :

    Les trois technologies novatrices qui équipent les accessoires intelligents

    Répercussions concrètes : comment tirer le meilleur profit des accessoires intelligents

    Les opérateurs qui ont opté pour des dispositifs équipés d’accessoires intelligents pour le diagnostic prédictif et la traçabilité des installations ont constaté des gains de performance très concrets :

    • Un opérateur nordique a vu ses délais de localisation des pannes divisés par huit (de 48 h à moins de 6 h), ce qui lui a permis de réaliser des économies considérables sur les frais d’interventions d’urgence et, par conséquent, de réduire ses frais d’exploitation.
    • Au Royaume-Uni, National Grid déploie des capteurs de décharge partielle et des capteurs thermiques sur ses systèmes de câblage moyenne et haute tension, pour réduire le nombre de coupures non planifiées et de conserver un indice SAIDI bas (rapport d’innovation de National Grid, 2022).
    • Alliander (Pays-Bas) déploie plus de 3 000 systèmes Smart Cable Guard (via un partenariat récent avec Nexans) sur son réseau moyenne tension afin de lutter contre le vieillissement des infrastructures et les risques de coupure.

    Selon les données de terrain, chaque unité évite plus de 6 000 minutes annuelles de temps perdu par client, notamment grâce à une précision de la localisation des pannes portée à 1 % de la longueur des câbles. Les résultats très prometteurs des premiers tests soutiennent l’initiative d’Alliander visant à réduire les indices SAIFI et SAIDI sur son réseau moyenne tension de 40 000 km.

    Une évolution stratégique dans la gestion du réseau

    Grâce à la mutation des accessoires, ces composants passifs qui deviennent intelligents, les opérateurs peuvent repenser la gestion de leurs réseaux pour les préparer aux enjeux de demain. Les accessoires intelligents jouent désormais un rôle central dans l’amélioration de la fiabilité, l’extension de la durée de vie des composants et la réduction des frais d’exploitation.

    Face au double défi du vieillissement des infrastructures et de l’accélération de l’électrification, ces solutions constituent un atout indispensable en matière de maintenance prédictive et de résilience du réseau. Elles offrent une avancée majeure, avec des systèmes autrefois statiques devenus des réseaux intelligents autosurveillés.

    En proposant des systèmes d’accessoires intelligents avancés et un accompagnement tout au long du cycle de vie, Nexans contribue directement à ce changement de paradigme qui permet aux opérateurs d’anticiper, de suivre et d’optimiser leurs réseaux avec une précision et une confiance inédites.

    Découvrez toute la gamme des accessoires Nexans

    Photo of Samuel Griot

    Auteurs

    Samuel Griot a rejoint Nexans en 2021 en tant que responsable du département d’ingénierie électrique au sein de Nexans Innovation. Il y dirige une équipe d’experts développant de nouvelles solutions innovantes pour les applications basse, moyenne et haute tension afin de répondre aux besoins futurs des réseaux électriques. Début 2025, il a été nommé Directeur des Solutions d’Innovation pour la Division Marché Réseaux d’Énergie. Il possède une solide expérience en architecture de réseaux électriques et en appareillage de commutation. Il est titulaire d’un Master en génie électrique de l’INSA de Lyon, France.

    Photo of Moussa Kafal

    Moussa Kafal dirige le portefeuille Fiabilité du Réseau chez Nexans, menant le développement et le déploiement mondial de solutions avancées qui améliorent la performance, l’intégrité et la résilience des réseaux électriques. Titulaire d’un doctorat en ingénierie et un Executive Master d’HEC Paris, il allie une expertise technique approfondie à un sens stratégique pour accélérer la transformation des systèmes énergétiques. Moussa supervise des initiatives clés en Europe, en Amérique du Nord, en Amérique latine et en APAC, positionnant Nexans comme un fournisseur de solutions de réseaux intelligents de premier plan dans un paysage d’infrastructure numérique en évolution rapide.

    L’importance des formations certifiantes pour accélérer l’électrification
    Électrification de demain
    17 juillet 2025
    6 min
    banner-power-training

    Du secteur aérospatial jusqu’à la production industrielle, les leaders d’aujourd’hui ne se contentent plus de fournir des produits. Ils deviennent des partenaires de long terme, présents à chaque étape du parcours client : conception, déploiement, diagnostic, assistance… et, de plus en plus, formation.

    Dans tous les secteurs d’activité, l’éventail de services proposé aux clients est en pleine mutation. La formation est devenue pour les entreprises un facteur crucial de maîtrise des risques, une garantie d’exécution efficace sur le terrain, et un moyen privilégié pour tisser des liens de confiance avec tous les acteurs qui dépendent de leurs technologies.

    La compétence, socle de l’expérience client

    Dans de nombreux domaines, le niveau de performance dépend tout autant de la précision humaine que des avancées technologiques. Considérons les exemples suivants :

    • Dans l’aviation, les formations sur simulateur préparent les équipages à la gestion de scénarios complexes ;
    • Dans la production industrielle avancée, les outils de réalité augmentée accompagnent les opérateurs dans l’application de procédures critiques ;
    • Dans les services financiers, le coaching assisté par IA améliore la qualité des interactions avec les clients.

    Ces approches témoignent de la conviction partagée que la qualité de l’expérience client n’est pas déterminée par la seule performance des produits, mais qu’elle dépend également de la capacité des utilisateurs à mettre ces produits en œuvre de manière correcte, constante, et sur l’ensemble de la chaîne de valeur, du début à la fin. Et cette montée en compétences est encore plus critique dans le secteur de l’énergie.

    Le défi de l’électrification : la complexité et ses conséquences

    À mesure que s’accélère la dynamique mondiale de décarbonation, l’électrification structure chaque jour davantage les systèmes énergétiques. Les réseaux électriques doivent aujourd’hui intégrer des énergies renouvelables et une production toujours plus décentralisée, entraînant des flux bidirectionnels et une production intermittente. Dans le même temps, les besoins augmentent avec le développement des véhicules électriques, des pompes à chaleur, de l’intelligence artificielle (et la construction associée de centres de données), et des industries électro-intensives.

    Les réseaux doivent donc être modernisés et devenir plus intelligents. Ils doivent aussi gagner en résilience face aux événements climatiques extrêmes. Leur vulnérabilité face aux erreurs humaines lors des opérations d’installation est désormais plus critique que jamais.

    D’après les estimations de l’ENTSO-E (Réseau européen des gestionnaires de réseaux de transport d’électricité), les infrastructures énergétiques européennes sont constituées à 60 % de composants âgés de plus de 40 ans. Dans de telles circonstances, les marges d’erreur diminuent rapidement ; la moindre erreur d’installation peut saper la satisfaction client en fragilisant la fiabilité et la sécurité des systèmes, ce qui provoque des retards, des actions en garantie et des surcoûts d’exploitation à long terme.

    Les chiffres sont éloquents :

    • L’installation incorrecte d’accessoires de câbles cause 400 millions d’euros de pertes annuelles en Europe ;
    • Les erreurs d’installation sont à l’origine de près de 50 % des défaillances d’accessoires de câbles moyenne tension ;
    • Aux Pays-Bas, 12,5 % des minutes comptabilisées dans le SAIDI (indice de durée moyenne des interruptions de service) sont directement imputables à ces problématiques.
      (Source : EA Technology, Jicable 2023 E1-4; Review of Medium-Voltage Asset Failure Investigations, 2018)

    Il ne s’agit pas là de défauts de conception, mais de problèmes d’exécution, et ceux-ci ne sont pas une fatalité.

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    L’importance cruciale de la formation (certifiante) pour l’électrification du monde

    L’origine de ces difficultés se trouve notamment dans une pénurie mondiale de professionnels qualifiés, qui s’aggrave de jour en jour, et ce particulièrement dans le secteur des réseaux électriques. L’ensemble du secteur de l’énergie est confronté à des goulets d’étranglement qui limitent la disponibilité des techniciens qualifiés pour l’installation et la maintenance de systèmes électriques toujours plus complexes. Outre qu’elle ralentit les déploiements des systèmes, cette lacune de compétences nuit également à leur sécurité et à leur performance sur le long terme. Dans de nombreux pays, et notamment dans les territoires les plus dynamiques en matière d’électrification, le manque d’équipes certifiées met directement en péril les objectifs de développement des infrastructures. Le constat est sans appel : pour avancées qu’elles soient, toutes les technologies demeurent fragiles à défaut d’un accès généralisé à des formations certifiantes.

    Ces certifications doivent souvent faire l’objet d’une homologation nationale officielle. En France par exemple, l’accréditation Cofrac™ ou la marque Qualiopi™ attestent que les formations visées respectent les normes en vigueur et qu’elles seront largement reconnues sur le marché. En plus de valider la qualité des formations, ces labels constituent avant tout un véritable permis d’exercer pour les installateurs réseaux, tout en favorisant la mobilité professionnelle et l’imputabilité technique sur les infrastructures électriques.

    La formation permet aussi de résorber les écarts entre les systèmes tels qu’ils ont été conçus, et leur mise en œuvre concrète. Elle remplit ainsi trois fonctions notables dans les infrastructures énergétiques d’aujourd’hui : la transmission des savoirs techniques critiques et la maîtrise des bons gestes, l’amélioration de la précision et de la rapidité d’exécution, et la diffusion d’une culture de la responsabilité et de l’excellence.

    Des effets quantifiables sur le terrain

    Une récente campagne d’évaluation interne des performances a montré que les équipes ayant suivi des programmes de formation structurés affichent :

    • Une baisse de 58 % du taux de défaillance des accessoires de câbles moyenne tension ;
    • Une vitesse d’installation 25 % supérieure ;
    • Un indice de satisfaction client de 97 %
      (Source : Nexans Internal Impact Study, 2024)

    Ces améliorations ne sont pas simplement théoriques. Elles ont une incidence directe sur la résilience des réseaux, la planification budgétaire, ma satisfaction et la confiance du client.

    Former pour moderniser et étendre les réseaux

    À mesure que les réseaux gagnent en complexité, les formations doivent s’adapter aux nouvelles réalités. Cela inclut, notamment pour Nexans :

    • Des exercices pratiques d’installation avec les accessoires effectivement mis en œuvre sur le terrain ;
    • Des certifications attestant non seulement les connaissances théoriques, mais également les performances pratiques ;
    • Des mesures de décharge partielle et des et essais de tenue diélectrique en CA sur les échantillons assemblés pendant la formation ;
    • Différentes versions linguistiques et des ajustements localisés ;
    • Des programmes portant sur les applications basse, moyenne et haute tension, y compris pour les énergies renouvelables.

    Les formations actuelles sont bien éloignées des cours magistraux et statiques jadis dispensés dans des salles de classe. Elles se veulent techniques, personnalisées, et alignées sur des objectifs opérationnels. Dans la plupart des cas, elles délivrent également les certifications requises pour exploiter et sécuriser les installations dans le respect des normes techniques en vigueur.

    Un exemple concret : les services de formation certifiante de Nexans

    Afin de répondre à la demande croissante d’équipes qualifiées d’installation et de maintenance, ainsi qu’à la pénurie généralisée de techniciens certifiés, Nexans a déployé à l’échelle mondiale un programme de formation complet et structuré. Ce programme est conçu pour traiter toute la diversité et la complexité réelles des projets d’électrification ; il est dispensé par une équipe dédiée de 25 formateurs et experts présents partout dans le monde (y compris aux Etats-Unis et en Amérique latine), dans un réseau de huit centres de formation répartis principalement en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie-Pacifique et en Europe, y compris en France et dans les DOM-TOM.

    Au cours de la seule année 2024, plus de 2800 professionnels ont participé à ces sessions de formation portant sur plus de 15 niveaux de tension et types d’accessoires, et présentées dans sept versions linguistiques. Les contenus couvrent les systèmes basse, moyenne et haute tension ainsi que leurs applications aux énergies renouvelables, et des modules adaptables sont disponibles sur demande pour approfondir les différentes phases des projets.

    Chaque session associe les savoirs techniques théoriques à des exercices pratiques et concrets. Les échantillons installés sont testés en conditions réelles avec des protocoles de mesure des décharges partielles et des essais de rigidité diélectrique, et les certifications délivrées n’attestent pas simplement que la formation a été suivie, mais que les compétences requises ont effectivement été démontrées.

    Une assistance digitale à distance

    Dans les projets complexes, la fiabilité est parfois telle que la simple formation des installateurs ne suffit pas : la supervision directe de l’installation devient le meilleur moyen de garantir une exécution optimale. Cette assistance peut être assurée par un expert technique sur site, ou, dans le cas de projets isolés, grâce à des outils de réalité mixte.

    C’est là que des dispositifs comme le Microsoft HoloLens 2 interviennent : ces casques permettent à un expert distant de guider un technicien en temps réel, via des superpositions visuelles et des communications en direct.

    Chez Nexans, ces solutions de réalité mixte sont intégrées directement dans les sessions de formation et les services d’assistance à distance. Elles permettent aux installateurs de bénéficier d’une aide immédiate, mains libres, sur le terrain — optimisant la qualité d’installation et la réussite des projets, y compris dans des sites isolés comme les parcs éoliens offshore ou les sous-stations rurales.

    Le succès de l’électrification dans le monde repose non seulement sur des systèmes intelligents, mais surtout sur des professionnels qualifiés, capables de les installer et de les exploiter. La formation leur donne les compétences et la confiance nécessaires pour assurer fiabilité, sécurité et régularité sur les réseaux électriques.

    Au-delà d’atténuer l’exposition des entreprises aux risques techniques, l’investissement dans la formation leur permet de cultiver des liens de confiance, d’améliorer les performances, et de redéfinir les attendus de l’expérience client. Dans notre trajectoire commune vers un avenir énergétique durable, toutes les connexions passent encore par l’expertise humaine.

    En tant qu’acteur innovant de la filière électrification, Nexans continue de développer des solutions de formation et de supervision avancées, contribuant à construire les réseaux de demain.

     

    Découvrez nos formations certifiantes sur la page dédiée “Skills Power”

    laurent-keromnes

    Auteur

    Laurent Keromnes, diplômé de l’ENSCPB Bordeaux en 1997 (physique et chimie), a débuté sa carrière en tant qu’ingénieur chimiste chez Arkema, une entreprise chimique française. Il y a passé près de 11 ans à développer des mousses PVC, puis des peroxydes organiques destinés à la réticulation des polymères.

    Depuis 2011, il travaille chez Nexans (fabricant de câbles) où il s’occupe du développement de câbles. Après 5 ans au centre de recherche, il a changé de poste au sein de l’entreprise pour devenir ingénieur en développement commercial pour les câbles enterrés dans les réseaux électriques. Il participe à la normalisation en tant que membre du TC20 à l’AFNOR et membre de plusieurs comités techniques pour les câbles au SYCABEL français.

    Depuis début 2024, il est responsable des centres de formation Nexans impliqués dans l’installation d’accessoires moyenne tension (MT) pour la division Power Grid Business.

    Redonner vie aux réseaux électriques : un levier clé pour la transition énergétique
    Électrification de demain
    05 mai 2025
    5 min
    cover-lever-energy-transition

    Imaginez un gigantesque réseau d’artères invisibles ou suspendues, fait de cuivre, d’aluminium et d’innovation. Un réseau si essentiel qu’il soutient, en silence, l’énergie de nos villes, de nos industries et de nos vies.

    Depuis des décennies, ces infrastructures accompagnent l’urbanisation, la croissance économique et la transformation de nos modes de vie.

    Pourtant, conçues pour un monde plus centralisé et prévisible, elles doivent aujourd’hui relever un défi sans précédent : s’adapter à un futur plus électrique, plus renouvelable, plus résilient.

    Comment moderniser ces réseaux, devenus les veines vitales d’une société en pleine mutation ? Et si la réponse n’était pas de tout reconstruire, mais de mieux valoriser ce que nous avons déjà ?

    Pourquoi il faut moderniser les réseaux existants

    Nos réseaux électriques sont les témoins silencieux de l’urbanisation, de la croissance économique et des mutations profondes de nos modes de vie. Mais ils ont été conçus pour un monde bien différent : un monde centralisé, moins électrifié, et surtout beaucoup plus prévisible.

    Aujourd’hui, ces infrastructures doivent relever des défis inédits. Elles doivent absorber la montée en puissance des énergies renouvelables, soutenir l’essor de la mobilité électrique, s’adapter à l’autoconsommation croissante et aux exigences de flexibilité énergétique. Elles doivent aussi gagner en résilience pour faire face à des événements climatiques extrêmes de plus en plus fréquents.

    Le saviez-vous ?

    • L’âge moyen des réseaux en Europe et en Amérique du Nord dépasse souvent 40 ans.
    • Les coupures dues aux phénomènes météorologiques extrêmes ont été multipliées par six en dix ans.
    • L’Agence Internationale de l’Énergie estime que 600 milliards de dollars par an devront être investis dans les réseaux d’ici 2040 (source : IEA report “Electricity Grids and Secure Energy Transitions” (october 2023).
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    Moderniser sans tout reconstruire : une stratégie gagnante

    Dans ce contexte, faut-il raser pour mieux reconstruire ? Pas forcément. La solution réside souvent dans une approche plus sobre, plus rapide et plus durable : renforcer, optimiser et adapter l’existant

    Cette stratégie présente de nombreux avantages. Elle permet de réduire les délais de mise en œuvre, de limiter les perturbations pour les riverains, de mieux maîtriser les coûts, tout en diminuant l’empreinte carbone des chantiers.

    Comment moderniser efficacement ?

    Grâce à plusieurs leviers techniques :

    • Renforcer les câbles critiques ;
    • Intégrer des capteurs intelligents pour détecter les faiblesses avant qu’elles ne deviennent des pannes ;
    • Reconfigurer les flux énergétiques pour éviter les saturations ;
    • Utiliser des matériaux recyclés ou bas carbone, comme des polymères techniques ou des métaux revalorisés.

    Voici en exemple concret : en Europe, plusieurs projets pilotes ont modernisé des portions vieillissantes du réseau sans devoir les démanteler :

    • ajout d’équipements connectés,
    • maintenance prédictive,
    • optimisation des infrastructures existantes.

    Résultat : des réseaux plus performants et plus résilients, sans tout reconstruire.

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    Faire du réseau existant un trésor circulaire

    Et si nos anciens réseaux devenaient une ressource d’avenir ? Moderniser, c’est aussi apprendre à valoriser l’existant. Les câbles de cuivre et d’aluminium peuvent être récupérés et réutilisés après traitement, les matériaux réinjectés dans de nouveaux projets, et des modules de pilotage intelligent installés pour prolonger la durée de vie des infrastructures. Une logique circulaire qui donne une seconde vie aux réseaux et contribue à une électrification plus responsable.

    À retenir :

    • 15 % de la demande mondiale en cuivre et aluminium pourraient ne pas être couverts d’ici 2030.
    • La circularité des matériaux devient une priorité pour limiter l’extraction de nouvelles ressources.

    En donnant une seconde vie aux réseaux, nous préservons les ressources naturelles et réduisons l’empreinte environnementale des nouvelles infrastructures.

    Une vision portée à ChangeNOW

    Discussion lors d'un événement avec intervenants et public, décor végétal en arrière-plan.

    Cette approche a été au cœur du débat lors de ChangeNOW 2025, avec une conférence dédiée : “Circular Economy – Today’s Waste is Tomorrow’s Growth”, réunissant David Grall, VP Sustainability & Corporate Transformation chez Nexans, et Xavier Mathieu, VP Metallurgy chez Nexans.

    Ils ont présenté des solutions concrètes pour :

    • Réduire l’impact environnemental sur le cycle de vie des matériaux ;
    • Intégrer pleinement l’économie circulaire dans l’infrastructure énergétique.

    Mieux faire avec ce que nous avons

    Optimiser sans surconsommer. Transformer sans tout reconstruire.

    C’est là toute l’ambition d’une transition énergétique réussie : rendre nos réseaux plus robustes, adaptables et sobres.

    Dans un monde où 80 % de l’énergie produite sera renouvelable d’ici 2050, moderniser nos infrastructures existantes est une nécessité stratégique.

    Il ne s’agit pas de renoncer à l’innovation, mais de l’appliquer là où elle a le plus d’impact. C’est agir maintenant pour construire un avenir plus durable.

    En résumé

    Moderniser nos réseaux, c’est renforcer la résilience énergétique,

    C’est réduire notre impact environnemental,

    C’est accélérer la transition vers un monde électrifié… sans repartir de zéro.

     

    Sources : 
    McKinsey, Eurelectric, AIE + Electric Disturbance Events report
    IEA report “Electricity Grids and Secure Energy Transitions” (october 2023)